Ligue 1 : même s’il est sacré champion de France, le LOSC devra subir une cure d’austérité

Ligue 1 : même s'il est sacré champion de France, le LOSC devra subir une cure d'austérité

Après un match nul avec Saint-Etienne, Lille est à un match du titre. Mais le modèle économique du club, basé sur la vente de joueurs, s’épuise. D’autant que l’échec de Mediapro n’a pas aidé.

«Le club ferait probablement faillite début janvier, ce qui impliquait un problème de continuité des activités pour les équipes. Cette phrase, l’une des premières prononcées par le nouveau PDG Olivier Létang lors d’une conférence de presse le 21 décembre 2020, a immédiatement répondu aux questions sur la date du changement de propriétaire à la tête du LOSC.

Cinq mois plus tard, alors que Lille est à quatre-vingt-dix minutes de sa victoire au championnat de France à la suite d’un match nul contre Saint-Etienne dimanche 16 mai (0-0), cette déclaration n’a pas perdu de poids. Il rappelle que si le succès sportif de la saison a pu empêcher le navire de couler, le problème financier demeure. Malgré les millions qui accompagneront les qualifications pour la prochaine Ligue des champions, le club ne peut pas maintenir le même style de vie.

Le fait qu’il ait réussi à le garder aussi loin est un petit miracle, étroitement lié aux résultats des premiers mois. Lorsque Gérard Lopez est contraint de quitter la présidence le 18 décembre 2020, Lille mène la Ligue 1 devant le PSG et vient de passer la phase de groupes de la Ligue Europa. La main-d’œuvre est jeune – en moyenne moins de 25 ans – et son meilleur est suivi par une grande partie de l’Europe.

Parmi les dix-sept joueurs qui appartiennent au LOSC mais sont en prêt, certains commencent également à se défendre. « Le côté positif, c’est que nous avons de bons joueurs, des forces », a déclaré Létang, jonglant avec des sujets comme le vocabulaire entre le sport et l’économie.

Un geste fort

Un geste fort

Le nouveau propriétaire, Merlyn Partners, injecte de toute urgence 50 millions d’euros et ne vend aucun joueur dans le mercato de janvier. Un geste fort, lié à la fois à la santé et au classement des équipes. Venu à la rescousse dans une période de difficultés financières, le FCP n’a aucune chance de payer le rachat en se débarrassant immédiatement de ses meilleurs collaborateurs.

Surtout pas dans le cadre de l’épargne collective d’un sport qui perd beaucoup d’argent en jouant dans des stades vides (aucun transfert n’a atteint 25 millions d’euros en janvier). Il lui faut donc voir à moyen terme, ne rien changer, en espérant que les résultats seront soutenus puis, en fin de saison, normaliser la gestion du club après une pause de quatre ans.

Miraculeusement maintenu dès la première saison sous la houlette de Gérard Lopez, Lille n’a pas quitté le top quatre dans les trois prochains. Mais le voyage n’a pas été facile. DNCG, le gendarme financier du football français, jamais totalement convaincu du modèle économique, a émis plusieurs cartons jaunes: le budget a été réécrit à l’été 2017, l’interdiction de recrutement en janvier 2018, puis, à titre préventif, les baisses ont finalement été levées; supervision des transferts et des rémunérations à l’été 2018; une amende de 50000 euros pour information erronée en mai 2019.

Aventures auxquelles il faut ajouter la validation tardive des comptes en juillet 2020 notamment, ainsi que la procédure en cours avec Marcelo Bielsa devant le tribunal du travail de Lille. L’ancien coach de Mastiff, licencié pour faute grave il y a près de quatre ans, a dénoncé le harcèlement destiné à le contraindre à démissionner et a exigé 19 millions d’euros. Le verdict doit être rendu le 2 juillet.

Pépites à bas coût

Pépites à bas coût

Le modèle économique de Lille, basé sur des échanges supposés, semblait fonctionner: chaque saison, le club du Nord vendait deux ou trois de ses meilleurs joueurs à un prix élevé, qu’il remplaçait par des pépites minées à bas prix par Luis Campos. La qualité des effectifs n’est pas née de cette faiblesse, mais des soldes de transferts clairement positifs – par exemple, Nicolas Pépé et Victor Osimhen, devenus les deux acteurs africains les plus chers de l’histoire – n’ont pas empêché les soucis financiers.

Laurent Blanc est en pole pour entraîner l’équipe en cas de départ de Christophe Galtier, ce dont beaucoup de gens n’ont aucun doute en interne.

Le huis clos et le retrait de Mediapro n’ont pas aidé, « mais il y avait un problème plus profond », assure Létang, discret dès son premier discours. Conseiller du président Lopez – et donc directeur sportif non officiel – sous le statut de fournisseur de services rare, Campos a constitué une équipe entière qui se dirige vers le titre. La nouvelle direction marque cependant la fin immédiate du partenariat, prend ses distances avec les clubs de Mouscron (Belgique) et Boavista (Portugal) avec lesquels des partenariats ont été conclus et construit progressivement une cellule de recrutement plus traditionnelle.

Le changement d’époque qui a gagné l’attaché de presse Florian Fieschi jugé trop proche des Portugais et se produit dans toutes les couches. L’histoire du club, Jean-Michel Vandamme est revenu à la formation de pilote – Lille a été classé 24e au dernier classement des centres agréés établi par la Fédération française de football. A Rennes, Sylvain Armand (coordinateur sportif) et Didier Roudet (directeur général adjoint) ont repris leurs fonctions ces dernières semaines. Adrien Tarascon (joueur et analyste de données), connu du PSG, est également arrivé. Laurent Blanc est en pole position pour entraîner l’équipe en cas de départ de Christophe Galtier, ce dont beaucoup de gens n’ont aucun doute.

Des économies à faire

Des économies à faire

Les CV des nouveaux arrivants sont prestigieux, et ceux qui ont pour objectif d’augmenter le personnel ne seraient pas non plus remarqués. Une question demeure: quelle sera la composition du club pour la saison prochaine? Le nouveau propriétaire, Merlyn Partners fund, a déjà mis la main dans sa poche et ne va pas investir à perte. Mais à part une poignée de clubs de Premier League – la Premier League anglaise – qui bénéficient de leur image de marque et de leurs droits télévisuels colossaux, presque personne ne gagne de l’argent au fil du temps.

Encore moins souvent, comme le LOSC, vous payez pour un stade qui ne serait rentable que s’il était complet à chaque match. Actionnaire minoritaire et candidat au rachat mi-2010, le Belge Marc Coucke a préféré investir dans son pays car il ne trouvait pas de business model crédible de ce poids à supporter. Le Bordeaux King Street Fund a préféré le retrait brutal, qui mettrait en péril l’avenir du club, plutôt que la perspective de dépenser davantage.

Avec 55 joueurs sous contrat – 20 de trop – vous pouvez économiser avant même de toucher les étoiles de l’équipe. Si l’offre est satisfaisante, Mike Maignan, Zeki Celik, Renato Sanches, Boubakary Soumaré, Jonathan Ikoné, Jonathan Bamba et Luiz Araujo ne doivent pas être bloqués. Mais pour eux et pour d’autres, y compris le défenseur Domagoj Bradaric, devenu international croate mais transparent depuis plusieurs mois, rien ne garantit que des clubs intéressés apparaîtront.

À la fin du contrat, le capitaine José Fonte est membre de l’équipe, mais renouveler le joueur de 37 ans n’est pas facile. Alors que la saison s’achève le dimanche 23 mai, la fin de la carrière universitaire se fait sentir: les derniers moments ensemble et la perspective d’une grande fête avant que chacun ne fasse son chemin.

Christophe Kuchly (Lille, correspondance)

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